Évaluer les projets d’infrastructure dans les économies émergentes : une approche basée sur les résultats

Les projets d’infrastructures, qu’il s’agisse de routes, d’eau potable, d’électricité ou autre, sont essentiels pour stimuler la croissance économique, réduire la pauvreté et améliorer la qualité de vie dans les pays émergents. Cependant, malgré les investissements massifs des institutions comme la banque mondiale, de nombreux projets échouent à produire des résultats durables. Ces échecs s’expliquent en partie par des méthodes d’évaluation axées sur les ressources mobilisées ou réalisations physiques, sans mesurer les impacts réels sur les bénéficiaires. Pour corriger cela, les experts en suivi et évaluation adoptent de plus en plus une approche alternative : l’évaluation centrée sur les résultats (Results-Based Approch, RBA). Explorons à travers cet article les bonnes pratiques pour une mise en œuvre efficace de la RBA et ses défis spécifiques aux économies émergentes.

Comprendre l’approche centrée sur les résultats

Le suivi et l’évaluation constituent un outil puissant pour garantir une gestion optimale et efficiente des projets, notamment dans des secteurs clés tels que l’énergie, la santé, les transports, et bien d’autres. Il repose sur plusieurs approches méthodologiques. L’approche d’évaluation basée sur les résultats s’appuie sur les objectifs que l’on souhaite atteindre. Contrairement à l’approche traditionnelle qui se limite à l’achèvement des travaux et la livraison du nouvel actif, la RBA se concentre sur les résultats et les impacts avec une logique d’intervention claire et des indicateurs mesurables. Cette approche met l’accent sur les effets réels des projets tels que l’amélioration de santé publique, la réduction du temps de trajet, la hausse du taux d’accès à l’électricité. Elle favorise la transparence, la redevabilité et l’apprentissage continu. Cette approche fait une distinction claire entre :

  • Intrants : ressources mobilisées (financement, main-d’œuvre, matériaux et autres).
  • Extrants : réalisations directes comme le nombre de forages réalisés, kilomètres de routes construits…
  • Résultats : changements immédiats pour la population bénéficiaire. Il s’agit par exemple de la réduction du temps de trajet, l’accès à l’électricité ou à l’eau.
  • Impacts : effets à long terme (la réduction de la pauvreté, la croissance économique ou autre).

L’approche basée sur les résultats amène à se demander d’abord « qu’est-ce qu’on veut changer » au lieu de « qu’est-ce qu’on peut faire ». Elle s’inscrit dans un processus d’amélioration continue et permet de :

  • définir et communiquer à toutes les parties prenantes les objectifs fixés ainsi que les résultats à atteindre ;
  • identifier les KPIs pour mesurer les résultats des différentes actions ;
  • repérer les failles dans les actions et apporter les ajustements nécessaires afin d’atteindre les objectifs fixés ;
  • évaluer les impacts de chaque projet sur les bénéficiaires.

Cette approche favorise une meilleure gestion de projet ainsi que la reddition de comptes auprès des partenaires financiers.

Comment intégrer l’approche d’évaluation centrée sur les résultats dans le cycle de vie d’un projet d’infrastructure

L’intégration de la RBA dans un projet d’infrastructure repose sur une logique d’intervention rigoureuse qui guide chaque étape du cycle de vie du projet. Elle permet non seulement de mieux orienter les actions, mais aussi de démontrer les effets tangibles d’un projet sur les bénéficiaires, ce qui renforce la transparence, la redevabilité et l’efficience des investissements. Cette intégration se déroule en plusieurs phases.

Phase de planification : poser les fondations de la RBA

L’intégration de la RBA dans un projet d’infrastructure commence dès la phase de conception. À cette étape, on passe d’une logique d’activité à une logique de changement. Le projet doit définir une théorie du changement en illustrant la chaîne causale entre les actions à mener dans le cadre du projet, les extrants, les résultats intermédiaires et les impacts visés. Il faudra aussi définir les objectifs SMART et les indicateurs pour chaque niveau de résultats ainsi qu’un cadre de résultats cohérent incluant les hypothèses et les risques. Par exemple, un projet de construction de routes dans une ville ne devrait pas seulement viser à réaliser un certain nombre de kilomètres, mais aussi à réduire le temps de trajet moyen ou à améliorer l’accès aux services essentiels. L’objectif de cette phase consiste à définir une logique d’intervention claire et orientée vers les résultats.

Phase de mise en œuvre : piloter par les résultats

À cette étape, le travail ne consiste pas seulement à surveiller la bonne exécution des activités, mais surtout de vérifier si les actions produisent les résultats escomptés. Cela implique donc la mise en place d’un système de suivi et évaluation (S & E) opérationnel avec une base de données dynamique et des outils adaptés (questionnaires, SIG, enquêtes de satisfaction et bien d’autres). Il est important de revoir régulièrement les performances afin d’ajuster les interventions en temps réel. Il faut adopter des mécanismes de gestion adaptative fondée sur les données produites. Selon l’OCDE (Organisation de Coopération et de Développement Économiques), un pilotage efficace par les résultats permet d’améliorer de 25 à 30 % la performance globale des projets financés dans les pays à revenu intermédiaire.

Phase de suivi et évaluation : démontrer l’efficacité et apprendre

L’évaluation intervient à la fin ou à mi-parcours pour mesurer les résultats et impacts à court, moyen et long terme. On privilégie deux grandes formes :

  • l’évaluation formative: elle est réalisée en cours de mise en œuvre pour ajuster les actions.
  • l’évaluation sommative: elle est réalisée à la fin du projet et permet de mesurer l’atteinte des résultats.

Les évaluations doivent reposer sur des méthodes rigoureuses (échantillonnage représentatif, approche mixte [quantitative et qualitative], groupes de comparaison et autres). Les experts en suivi et évaluation peuvent recourir à des outils comme l’analyse coût-efficacité ou l’analyse contre-factuelle pour évaluer les grands projets d’infrastructure.

Il faut noter que l’intégration de la RBA dans un projet d’infrastructure ne peut être effective sans des capacités techniques solides au sein des équipes de projet et une volonté politique. Par ailleurs, la participation des parties prenantes y compris les bénéficiaires dans la définition des indicateurs et l’interprétation des résultats est indispensable.

Les défis spécifiques à l’évaluation des projets d’infrastructure dans les économies émergentes

Les économies émergentes font face à des défis particuliers qui compliquent l’évaluation des projets d’infrastructure.

  • Faibles capacités institutionnelles: les institutions chargées de la planification, de la mise en œuvre et de l’évaluation manquent souvent de ressources humaines et techniques.
  • Problèmes de données : les données nécessaires pour mesurer les résultats de manière fiable ne sont pas souvent disponibles. La qualité des données disponibles est parfois aussi remise en question.
  • Risques politiques et instabilités: la corruption, les changements de gouvernement et les conflits peuvent perturber les projets et biaiser les évaluations.
  • Complexité des projets : les projets d’infrastructure sont souvent de grande envergure, impliquent de multiples parties prenantes et de longs délais. Cela rend l’évaluation plus complexe.
  • Contraintes financières: elles poussent parfois les experts à privilégier les extrants visibles au détriment des résultats durables.

Le développement des infrastructures durables et inclusives est particulièrement complexe dans les économies émergentes compte tenu de ces défis. Pour réussir, il est essentiel de surmonter les défis spécifiques aux contextes locaux, en renforçant les capacités institutionnelles, en améliorant la collecte de données et en impliquant toutes les parties prenantes. Spécialisé dans le suivi et évaluation des projets dans différents secteurs, le cabinet Kerus Consulting International dispose de l’expertise requise pour un suivi et une évaluation efficace suivant l’approche basée sur les résultats. N’hésitez pas à nous contacter pour un partenariat durable.

 

Références

  1. Banque mondiale — Guide pratique pour concevoir un cadre de résultats
  2. OCDE – Apprendre des évaluations de la gestion axée sur les résultats
  3. Concevoir et évaluer son projet avec une approche par résultats
  4. Utiliser le suivi et l’évaluation axés sur les résultats pour obtenir des résultats sur les principaux projets d’infrastructure en Chine

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